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l’épave du cynthia.

toute l’histoire de l’enfant. Je suis venu pour la savoir, et je ne lui veux que du bien, je vous l’assure. »

Le pêcheur, se grattant l’oreille, parut hésiter un instant. Mais, voyant que le docteur attendait son récit avec impatience, il finit par se décider à parler.

« Les choses sont bien ainsi qu’on vous les a contées, et l’enfant n’est pas notre fils, dit-il comme à regret. Voilà bientôt douze ans de cela, j’étais allé pêcher au-delà de l’îlot, qui masque l’entrée du fjord vers la haute mer !… Vous savez qu’il repose sur un banc de sable et que la morue y est abondante !… Après une assez bonne journée, je relevais mes dernières lignes et j’allais hisser ma voile, quand je vis flotter sur les eaux, au soleil couchant, à environ un mille de distance, quelque chose de blanc qui attira mon attention. La mer était belle, et rien ne me pressait de rentrer au logis. Au lieu de mettre le cap sur Noroë, j’eus la curiosité de gouverner sur cette chose blanche et de voir ce que c’était. En dix minutes je l’avais rejointe. L’objet qui flottait ainsi, porté vers la côte par la marée montante, était un petit berceau d’osier, enveloppé d’une housse de mousseline et bien attaché sur une bouée. Je m’en rapprochai jusqu’à portée de la main avec une émotion que vous pouvez comprendre ; je saisis la bouée, je la tirai de l’eau, et j’aperçus alors dans le berceau un pauvre bébé de sept à huit mois, qui dormait à