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l’épave du cynthia.

qu’un seul mouvement respiratoire de l’océan Polaire vînt faire éclater tout ce rapiéçage. Après quatre ou cinq heures d’un travail surhumain, on était à bout de forces, et pourtant le danger ne faisait que croître, car la tempête allait en grandissant.

Erik tint conseil avec ses officiers et se décida à mettre en sûreté sur la banquise un dépôt de vivres et de munitions, pour le cas où l’Alaska ne pourrait pas résister à ces épouvantables secousses. Dès le premier moment, d’ailleurs, chaque homme avait reçu des provisions personnelles pour huit jours avec des instructions précises, en cas de désastre, et l’ordre de garder, même au travail, le fusil en bandoulière. L’opération du transbordement d’une vingtaine de tonneaux ne fut rien moins que facile ; mais enfin on en vint à bout et l’amas de vivres fut logé à deux cents mètres environ du navire, sous une bâche goudronnée que la neige eut bientôt couverte d’un épais manteau blanc.

Cette précaution prise, tout le monde se trouva plus rassuré sur les suites immédiates d’un naufrage possible, et l’équipage s’attabla pour réparer ses forces devant un souper supplémentaire, arrosé de thé au rhum.

Tout à coup, au milieu même de ce souper, une secousse plus violente encore que les précédentes agita la banquise. Une pression formidable rompit le lit de glaces et de neige sur lequel reposait