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l’épave du cynthia.

barrer le chemin vers l’est s’il était tenté de changer de route en se voyant arrêté au nord.

Cette précaution se trouva pleinement justifiée, car, vers deux heures, une longue barrière de glaces se profila à l’horizon. Aussitôt le yacht américain se porta vers l’ouest, laissant la banquise à quatre ou cinq milles au large, par tribord. L’Alaska suivit immédiatement sa manœuvre, mais, cette fois, en obliquant à gauche de l'Albatros, de manière à le couper, s’il tentait de revenir au sud.

La chasse devenait très émouvante. Certain de la direction que l’Albatros était obligé de suivre, l’Alaska cherchait à le prendre en flanc, de manière à le pousser de plus en plus contre la banquise. Le yacht, de plus en plus hésitant, retardé par les glaces flottantes, changeait à tout moment d’allure, tantôt appuyant au nord, tantôt se jetant éperdument vers l’ouest.

Erik, monté sur le « nid de corbeau », suivait avec attention ses moindres feintes, pour les déjouer par des mouvements appropriés, quand tout à coup il vit le yacht s’arrêter court, virer de bord et se présenter par l’avant. Une longue ligne blanche, qui s’étendait à l’ouest, disait assez la cause de cette manœuvre : l’Albatros était venu se jeter au fond d’un véritable golfe, formé par un promontoire méridional de la banquise, et, comme un fauve acculé par la meute, il lui faisait face.

Le jeune commandant de l’Alaska n’avait pas eu