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critique et conférences

fonder l’École romane. Salut à l’École romane et que le bon Dieu lui donne de longs jours !

La question du vers libre ou non me semble plus pressante. Elle est à l’ordre du jour, — et M. Edmond Picard va, ce soir même, à Anvers, en parler, avec sa haute compétence, à propos de l’excellent poète français, mon ami, Henri de Regnier… J’ai de précieux frères d’armes belges et français qui manient, en vérité, le vers libre avec talent, ingéniosité — et sans doute, sans nul doute, avec logique, avec une logique implacable qui me déjoue un peu, mais je dois me tromper, j’espère me tromper, car là peut-être, là sans doute est l’avenir — car l’avenir est toujours à quelqu’un, quoi qu’en dise le poète.

Je ne reprendrai pas ici l’histoire du mouvement littéraire de cette période, romantisme, parnasse contemporain, renouveau lui-même du romantisme, un romantisme en avant où gronda le formidable vers de Leconte de Lisle, où chatoya et tinta celui de Théodore de Banville, où celui de Baudelaire gémit et luisit, flamme funèbre et chant frissonnant ; trinité révérée et vénérée d’où, sans conteste, procédèrent les premières œuvres d’une génération déjà mûre, très mûre, pensent et disent presque d’aucuns impatients, génération dont je suis, dont est Stéphane Mallarmé, dont sont d’autres encore, pleins,