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souvenirs et promenades

cratie » : proclamations vraiment pas trop mal tournées, et signées — enfin ! — de noms absolument nouveaux, tels que Camélinat, etc. On y lisait des choses véritablement raisonnables à côté d’insanités presque réjouissantes. Pour mon compte, je fus emballé, tout jeune que j’étais pour ainsi dire encore et frais émoulu, entre des poèmes parnassiens, oh ! qu’impossibles ! des réunions publiques, si naïves d’ailleurs, des temps tout proches de l’Empire. Et puis c’était franc, nullement logomachique et d’une langue très suffisante’ dans l’espèce. Bref, j’approuvai, du fond de mes lectures révolutionnaires plutôt hébertistes et proudhoniennes, cette révolution tenant de Chaumette et de Babœuf et de Blanqui. Et puis, quelle réhabilitation de la Garde Nationale enfin sérieuse et redoutable après Daumier et tant de vaudevilles Louis-Philippe et faux-toupet !

C’est au moment où nous enterrions le pauvre Charles Hugo qu’avait lieu le drame de la rue des Rosiers. La triste nouvelle tintait déjà dans l’air assombri. En même temps, les barricades ébauchées le matin devenaient formidables, s’armaient de canons, de mitrailleuses, se hérissaient de baïonnettes au bout de fusils chargés. Les passants chuchotaient des paroles d’alarme et filaient vite. Les boutiques se fermaient et