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III

Retour, donc, à Metz, où le régiment de mon père était mandé à nouveau.

J’ai déjà décrit quelque peu de mon Metz enfantin. Ce que je m’en suis laissé à raconter n’a guère rien de bien frappant : c’est l’au-jour-le-jour de l’existence, de la croissance plutôt, d’un petit qui devient grandelet. « Le petit », c’est ainsi qu’on me désignait dans la maison et que l’on continua de me désigner bien longtemps, même quand j’eus poussé en un grand flandrin qu’exaspérait alors ce mot de « petit », si doux aujourd’hui à mes vieilles oreilles orphelines qui ne l’entendent plus qu’en rêve, parfois, rêve aux tristes, bien tristes sursauts !

Ce petit donc que j’étais, et qui ne grandissait pas trop, ni même assez, en sagesse, néanmoins s’éveillait aux choses d’alentour. Les yeux surtout chez moi furent précoces : je fixais tout, rien ne m’échappait des aspects, j’étais sans cesse en chasse de formes, de couleurs, d’ombres. Le jour me fascinait et bien que je fusse poltron dans l’obscurité, la nuit m’attirait, une curiosité m’y