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mes prisons

dans des cas graves comme le mien, reste aussi étroite, la surveillance aussi stricte que pour les prisonniers que leur pauvreté ou la nature de leur faute laisse dans l’horreur toute nue du Règlement. C’est ainsi que la cellule que j’occupais dans un bâtiment à part ne s’ouvrait qu’une heure par jour pour une promenade solitaire dans une cour pavée que durement ! et triste !

Par-dessus le mur de devant ma fenêtre (j’avais une fenêtre, une vraie ! munie, par exemple, de longs et rapprochés barreaux), au fond de la si triste cour où s’abattait, si j’ose ainsi parler, mon mortel ennui, je voyais, c’était en août, se balancer la cime aux feuilles voluptueusement frémissantes de quelque haut peuplier d’un square ou d’un boulevard voisin. En même temps m’arrivaient des rumeurs lointaines, adoucies, de fête (Bruxelles est la ville la plus bonhommement rieuse et rigoleuse que je sache). Et je fis, à ce propos, ces vers qui se trouvent dans Sagesse.

. . . . . . . . . . . .

Un oiseau sur l’arbre qu’on voit

Chante sa plainte.

. . . . . . . . . . . .

Cette paisible rumeur-là

Vient de la ville.

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Qu’as-tu fait, ô toi que voilà

Pleurant sans cesse.