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mémoires d’un veuf

de loin par échappées un mur de soutènement, avec, dessus, des haies en fleurs derrière lesquelles s’élèvent de blanches chapelles funéraires de tout style et de toute hauteur qu’éventent de beaux arbres à ombelles où pépient moineaux et fauvettes : c’est presque grec et silicien, cette nécropole de marbre et de verdure en pleine ville vivante, qui n’apparaît, dans l’éparpillement d’élégants hôtels où tout respire l’insouciance de mourir, que comme un long éclair bien doux sous un ciel si bleu…

Le vrai Paris n’est’pas sans intervenir dans ces divagations, mais toujours quelques modifications à moi, quelques innocents travaux d’édilité viennent y fourrer du baroque et de l’imprévu. C’est ainsi qu’à la hauteur du bazar Bonne-Nouvelle, entre le boulevard de ce nom et une rue qui s’y jette, j’installe un passage vitré, qui fait un coude, par conséquent. Cette galerie est très belle, large et marchande, incomparablement mieux que tout ce qui existe en ce genre. Je dote aussi les rez-de-chaussée de grilles-barrières et les sous-sols, — extérieurs alors — de balustrades transversales, comme à Londres.

Par contre, si je rêve que j’y suis, à Londres, tout cet appareil caractéristique disparaît. Et c’est une ville de province aux rues étroites en colimaçon avec des enseignes en vieux français, où par le plus désagréable et le plus entêté des hasards, je