Page:Verhaeren - Œuvres, t9, 1933.djvu/112

Cette page a été validée par deux contributeurs.
110
œuvres de émile verhaeren
Et leur ventre bombé s’y gonfle à l’abandon.

On admire les pieds sculptés du guéridon
Où s’appuyait le coude enflé du vieux notaire,
Jadis, quand il fumait sa longue pipe en terre,
Tranquillement, à la fenêtre, aux soirs d’été.
On songe avec respect à son intégrité ;
Dire que ces cartons vides, aux parois vertes
Ont contenu l’objet de tant d’affres souffertes !
Que ces casiers ouverts et ces béants tiroirs
Ont recelé tant de ferments de désespoir !
Et l’on parle à l’écart, la main contre les lèvres,
Du testament subtil qu’il fit faire à l’orfèvre,
Pour qu’aucun legs ne pût froisser aucun neveu.
Chacun de ses contrats, comme un trousseau de nœuds,
Tenait le droit flottant en ses clauses serrées.
Pourtant, que de fureurs se sont exaspérées,
Devant son bureau sombre, insensible et massif !
La veuve du brasseur et leur fils adoptif
Se sont battus jadis, au seuil de son étude :

Il est vrai que leurs poings en avaient l’habitude.


On n’attend plus que l’échevin,

Qui doit rentrer d’Alost, où se touchent ses rentes,
Pour déguster et mettre en vente
Le vin.
Et le doyen et l’archiviste

Touchent déjà le « Haut Brion »,