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L'ANARCHISTE

coups que je me serais bien laissé battre s’il avait voulu ! Personne, au contraire, ne m’a tant soignée et dorlotée ; quand je suis malade, il me veille comme si mon existence était vraiment une chose précieuse ! »

« Ce qui est arrivé est tellement inouï que je ne puis y croire encore, que je me demande à tout moment si je n’ai point fait un mauvais rêve…

» Comme tous les soirs, nous étions allés à la ferme, et, comme il nous arrivait souvent aussi, nous y avions accepté à dîner. M. Guillaumet n’était pas seul : deux cultivateurs des environs avaient également profité de son hospitalité, à cause de l’ouragan qui faisait rage et jetait des arbres entiers au travers des routes. Le dîner, très gai, dura longtemps, et plusieurs bouteilles de vieux vin furent vidées en notre honneur.

» La politique avait presque uniquement fait les frais de la conversation, car vous devez savoir, cher maître, que les paysans ne s’occupent pas d’autre chose, en dehors de leurs semailles et de leurs récoltes. Dans notre bourg, les quelques heures dérobées au travail sont employées à lire et à discuter les journaux du département. L’anarchie avait été, chez notre hôte, attaquée et bafouée avec une grande violence. Ces braves gens, dont l’existence s’était écoulée à engraisser