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L'ANARCHISTE

ont besoin, surtout, d’un appui moral. Surveillez les donc, donnez-leur de bons conseils et supportez avec patience les divagations du mari.

— J’y tâcherai. Cependant, je suis parfois un peu vif aussi, surtout après les repas, et je ne mâche pas toujours mes paroles. Vous savez ce que je pense de toutes les théories de ces imbéciles ? Eh bien ! si la moutarde me monte au nez, je le dirai crûment à ce petit raté qui n’a même pas la force de soulever un fusil ! Est-ce que le partage est juste, voyons, quand ce n’est qu’au prix d’un labeur acharné que nous avons acquis une modeste aisance ? Il suffirait donc de dire : «Je veux ! » pour dépouiller toute une famille d’honnêtes gens qui, de père en fils, ont gagné leur pain si péniblement ? Une poignée de gueux, venus on ne sait d’où, nés d’on ne sait quel crime, incapables d’aucun effort, ni d’aucun bon sentiment, pourraient nous piller, au mépris de toute loi et de toute justice ?… C’est inadmissible… Nous possédons, parce que nous avons été plus obstinés, plus actifs, plus intelligents et plus adroits. Je crois que tant que le monde existera, il en sera toujours de même, et que ce qu’on renverserait aujourd’hui se rétablirait demain.

Tenez, voilà mes valets de ferme : ils sont heureux de m’obéir, et ne cherchent qu’à amasser un peu d’argent pour pouvoir à leur tour ache-