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L’ÉTOILE DOUBLE

dans ce monde prodigieux, je ne vis pas un arbre, pas une fleur, pas un brin d’herbe ! rien de ce qui m’eût rappelé la terre même vaguement.

Nous volâmes pendant des milliers de lieues, nous traversâmes des mers de flammes dont les vagues infernales s’enflaient, se couchaient, se creusaient et s’élevaient capricieusement, sans cause apparente. Ces flammes étaient bleues comme celles du punch et ne dégageaient aucune chaleur. De temps à autre des monstres se poursuivaient sur la crête des flots, ouvrant des gueules terribles, et roulant des yeux énormes. Puis, tout à coup, à des profondeurs inouïes, soudain dévoilées, des ossements apparaissaient, des ossements étranges d’un blanc de nacre qui ne semblaient avoir appartenu à aucun être connu, et qui se heurtaient sans cesse au fond d’un abîme de feu.

— Tu vois, reprit la chimère, ce sont les squelettes de ceux qui n’ont pu supporter l’épreuve de ce monde divin si supérieur à ceux qu’ils ont habités.

— Y a-t-il là des squelettes humains ?…

— Non. Les humains en sont encore aux premiers échelons de la science, et le Maître, jusqu’ici, ne les avait pas jugés dignes d’entrer dans ce cénacle. Les humains qui se nourrissent de chair, se combattent et se détruisent, ne sont considérés que comme des êtres inférieurs, à peine