Page:Vaudere - L anarchiste.pdf/252

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
245
RÉINCARNATION

jeune fille, étendue sur le sol, les regardait voltiger au-dessus de sa tête.

Ghislain s’était senti attiré invinciblement vers cette prairie, et, obéissant à la force mystérieuse qui le guidait, il était arrivé auprès de Djalfa.

Elle s’était levée, rougissante, puis sans dire un mot, elle était tombée dans ses bras, comme si, depuis longtemps, elle n’avait vécu que dans l’attente de cette minute bienheureuse.

Ghislain, pénétré des doctrines nouvelles, se dit qu’il avait rencontré la femme engendrée spécialement pour lui, l’âme sœur que l’on ne trouve presque jamais sur la terre, et que, par elle et pour elle, il devait vivre désormais. Djalfa avait senti un ineffable tressaillement en tout son être, quand les lèvres du jeune homme avaient pressé les siennes ; instruite aussi des mystères de la Kabbale et de la théosophie, elle savait qu’un inconnu devait venir, et, qu’ainsi qu’on enlève un fruit aux branches du chemin, il l’en lèverait à sa misère errante, pour lui faire une existence de luxe et d’amour.

Les bohémiens ont conservé, intactes au milieu de leurs pérégrinations, des traditions intéressantes, originaires du Thibet, qui se rapprochent sensiblement des doctrines théosophiques ; la jeune fille avait donc étudié les mêmes grimoires que son amant, son esprit s’était ouvert aux

14.