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RÉINCARNATION

Bérengère étant la seule personne qu’on eût mêlée à son intimité, il éprouvait quelque plaisir à la voir, bien qu’un secret antagonisme les mit déjà, en défiance. Aucune similitude de caractère entre eux, si ce n’est le même besoin de domination, visible chez la jeune fille, inavoué encore chez son fiancé. Mais tandis que l’une était en pleine possession de ses forces séductrices, l’autre cherchait à démêler l’effroyable chaos de ses pensées. Immobile, comme faradisé, il essayait vainement de les coordonner. Il subissait une suite d’impressions non formulées qui étaient comme la représentation imaginée de ses sensations. Vaguement, il tentait d’échapper au pouvoir de Bérengère qui, usant de toutes les armes que la nature lui avait données, déjouait avec habileté ses résolutions, et le poursuivait de son inutile tendresse. Peu à peu pourtant, il secoua le joug : ses idées devinrent plus larges, son caractère s’affermit : tout ce qui était simple et vulgaire lui sembla méprisable. Ses études brillamment terminées, il se lança dans les complications de la théosophie, cherchant avec quelques esprits profonds, à pénétrer les mystères de cette science récemment mise à la mode. Il se consacra avec cette élite au triomphe de la sagesse, et à la découverte de la nature hyperphysique et invisible. Il lui sembla sortir d’un long sommeil ;