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UNE VENGEANCE

se joue de moi ! Je veux savoir ; assez de grimaces ! Le noir m’indiqua un coin obscur de la chambre, et j’aperçus le spectre hideux de Bérénice, debout comme je l’avais vu, la nuit, à mes côtés.

» Dans la cour, le chien pleurait toujours, et cette plainte profonde exaspérait mon angoisse. Alors, j’eus une atroce crise de nerfs, la fièvre me gagna, et, depuis, je m’en vais lentement. Encore quelques pas et je l’aurai rejointe, la chère, la douce aimée ! Elle m’attend d’ailleurs, elle me guette, je l’entends qui m’encourage à mourir. Oh ! ce ne sera pas long ! »

Georges d’Ambroise poussa un soupir, et un peu d’écume lui vint aux lèvres. Je lui tendis une potion préparée sur le guéridon ; il but quelques gorgées, et, m’ayant pris la main, il la serra doucement.

— Je t’ai fait venir, vois-tu, pour que tu m’ensevelisses avec elle.

— Quoi ! avec cette statue ?

— Ce n’est pas une statue ; c’est son corps arraché de la tombe qui ne peut y reposer sans moi. Tu me promets d’accomplir ma volonté ?…

— Soit, lui dis-je, ne voulant pas exaspérer sa folie ; mais nous te sauverons, je l’espère.

Il secoua la tête.

— Je ne saurais plus vivre, laisse ma destinée s’accomplir.

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