Page:Vaudere - L anarchiste.pdf/196

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
189
UNE VENGEANCE

suis fou ! Je souffre comme un damné, et l’idée du suicide s’impose à moi, irrésistiblement. Tout, plutôt que l’effroyable mystère contre lequel je lutte avec rage et désespoir ! Cette statue… Oh ! cette statue qui me hante, me martyrise et me tue !… D’où vient-elle, que veut-elle ?… Toi qui raisonnes et comprends, dis-moi sa volonté ! Tu vois bien qu’elle me torture sans pitié et que je succombe de crainte et d’horreur !

— Il serait plus simple de l’éloigner de cette pièce, et, si tu veux, je te délivrerai de sa vue.

Je fis un pas vers la statue ; mais Georges se dressa sur son lit, les regards étincelants, la lèvre tordue.

— M’enlever Bérénice ! hurla-t-il, jamais entends-tu, je te le défends ! Nous descendrons ensemble dans la tombe. Tu me crois donc bien faible ou bien lâche ?…

Il éclata d’un rire effrayant qui le rabattit sur l’oreiller, la face cadavéreuse, les yeux convulsés.

— Calme-toi, suppliai-je, je n’avais pas l’intention de te contrarier.

Au bout d’un moment, il reprit ses sens, et me saisissant le bras, il me fit jurer solennellement de ne jamais toucher à la sombre image de sa bien-aimée, ajoutant qu’il se tuerait sous mes yeux, si je lui désobéissais.

11