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UNE VENGEANCE

dée. Elle est venue toute seule. Monsieur l’a trouvée installée dans sa chambre un soir en rentrant. C’est depuis ce moment qu’il est tombé malade.

— Que me racontes-tu là ? mon pauvre Porto ! La frayeur t’a troublé la raison : ton maître a dû acheter celte figure à quelque sculpteur de ses amis ; mais je ne comprends pas trop le sentiment qui a guidé son choix. C’est un emblème de désespoir ou de remords et l’esprit affaibli de ce pauvre Georges ne s’est certainement pas raffermi à le contempler. Si tu m’en crois, nous porterons cet ornement dans une autre chambre, à moins que nos forces ne soient insuffisantes.

A cette proposition le noir se leva comme mû par un ressort et s’enfuit en criant. Je reportai la lampe où je l’avais prise, et restai plongé dans de singulières pensées. Que signifiait cette terreur du maître et du domestique ? pourquoi ce mystère ? Comment la vue d’une statue pouvait-elle, à ce point bouleverser des êtres sensés, et quel remède était-il possible d’apporter à cet état de choses ?

Georges demeurait immobile ; une légère coloration lui était revenue aux pommettes et sa respiration reprenait régulièrement.

Je tâchai de dormir un peu, afin de retrouver, avec le repos du corps, la pleine possession de ma raison. Mais, comme je fermais les yeux, un