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UNE VENGEANCE

Je m’approchai, et l’examinai plus à l’aise.

Ses cheveux fins, coupés ras, grisonnaient sur les tempes, son front élevé et bombé avait la couleur de la cire. Son nez se pinçait aux narines, ses lèvres rentraient. Sans l’extraordinaire éclat de ses prunelles. il eût semblé déjà appartenir à la tombe.

— Tu n’as donc personne pour te soigner ?… demandai-je.

A cette question, un être accroupi près du lit se dressa lentement. C’était un nègre petit et chétif, au visage effaré, aux lèvres lippues.

Georges me l’indiqua de la main.

— J’ai Porto, mais il est si poltron qu’il tremble au moindre bruit et se sauve au moindre prétexte. Ma tête de l’autre monde lui semble évidemment peu agréable à contempler quand la nuit est venue.

Porto balbutia quelques mots inintelligibles, et, son maître l’ayant congédié, il partit avec une évidente satisfaction.

— Si tu n’as que ce moricaud ici, dis-je, tu es inexcusable de ne m'avoir pas appelé plus tôt.

— J’ai encore une femme de ménage, mais je préférerais n’avoir personne.

— Je ne te comprends pas. Dans ton état tu as besoin de dévouement, de soins empressés. Qui donc, ici, pourrait te secourir en cas d’aggravation du mal ?…