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LE CENTENAIRE D’EMMANUEL

delà a passé. Chancelant, je promène autour de moi des regards égarés. La salle, sans doute, va crouler sous les applaudissements, les trépignements, et mille bras vont se tendre vers moi dans un élan d’enthousiasme involontaire. C’est enfin le triomphe de la vérité et de la justice… Je me sens défaillir… un silence de glace règne dans l’assistance. Les académiciens se regardent, et l’un d’eux, le plus chauve et le plus cassé, laisse tomber ces simples mots : « Cet homme est fou ! » Aussitôt le plus terribles vociférations se font entendre ; on me traîne hors de la salle, on m’insulte, on me crache au visage. Et, derrière moi, la fanfare joue une marche triomphale pour couvrir mes sanglots et mes cris de détresse.

O foule insensée et lâche ! où donc est ton intelligence, où donc est ta pitié ?… Comprends-tu seulement ces vers que tu acclames, ces vers d’Emmanuel défunt ? puisque ceux d’Emmanuel ressuscité ne soulèvent que ton mépris !… Des regards étincelants se tournent vers moi, des huées me poursuivent, et comme je m’arrête à bout de force, on me frappe, on me foule aux pieds ; bientôt mes mains et mon visage ruissellent de sang, mes vêtements s’en vont par lambeaux… Je perds connaissance.

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Quand je reviens à moi, je me trouve couché