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NIHILISTE

choses lointaines, d’une voix affaiblie qui semblait monter du passé. Je n’osais l’interroger, m’étant promis de ne pas chercher à pénétrer son existence, mais je sentais que son secret était sur ses lèvres, et qu’il n’eût pas fallu insister beaucoup en ce moment pour le connaître.

— Mon adorée Louise, murmurai-je en caressant doucement ses cheveux.

— Ecoute, dit-elle, quand tu m’appelles ainsi, je crois que tu parles à une inconnue et mon cœur se serre. Louise n’existe pas, je me nomme Terka.

— Pourquoi m’as-tu trompé ?

— Je ne t’ai pas trompé. Tu ne m’as jamais questionnée sur mon nom véritable. Et qu’importe ! d’ailleurs, pourvu que tu t’engages à aimer Terka comme tu as aimé Louise ?

— Tu sais bien que chaque heure qui s’écoule entre plus profondément cet amour en mon être, et que, si tu voulais l’en arracher, un peu de mon existence partirait avec lui. Chère, chère Terka !

— Il est joli, mon nom ?… Dis-le encore.

Je le murmurai insatiablement, l’appuyant chaque fois d’un baiser. Tout à coup, elle me repoussa et se mit à pleurer, comme si l’aile noire de sa destinée l’eût souffletée dans l’ombre.

A partir de ce moment, le retour fut désolé. Assis côte à côte, nous nous observions en silence ; de funestes pressentiments nous accablaient, il