Page:Vaudere - L anarchiste.pdf/113

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
106
NIHILISTE

loué l’atelier depuis trois mois seulement ; qu’elle ne recevait personne et devait travailler beaucoup, car, au moment de l’emménagement, l’on avait apporté dans le pavillon un grand nombre de bustes en terre inachevés. Son mobilier se composait d’un mauvais lit de fer, d’une table et de quelques chaises. Par exemple, une dizaine de coffres fort lourds, qu’elle surveillait avec le plus grand soin, avaient été déposés dans un coin, et, peut-être, contenaient-ils de riches étoffes et des bibelots précieux. Avec ces artistes, on ne sait jamais ! La misère côtoie, parfois, un luxe inutile et bizarre.

— D’ailleurs, c’est honnête, conclut le concierge. Belle comme elle est, la petite pourrait faire fortune.

Cette dernière réflexion me fit plaisir. Donc, je ne me trompais pas : Louise était vraiment belle, puisqu’elle avait également séduit mes goûts raffinés et les vulgaires instincts de cet homme.

Le lendemain, j’achetai chez un fleuriste une grosse botte de roses et de lilas blancs que je fis déposer devant sa porte. Mais, elle ne les ramassa pas, et, la neige qui tombait toujours, en fit des fleurs de marbre.

Plusieurs envois semblables eurent le même sort. Elle ne demanda même pas au concierge le nom de son mystérieux adorateur.