Page:Variétés Tome II.djvu/8

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui devroient estre composez par deux ou trois personnes au plus ne peuvent estre entrepris par une compagnie aussy nombreuse et dont les sentiments sont si partagez.

À la vérité, le Dictionnaire pourroit estre destaché en plusieurs parties différentes, et seroit par conséquent plus susceptible de ce travail. Cependant, après soixante ans et plus d’une application continuelle, ce Dictionnaire si attendu et tant célébré avant sa naissance a enfin paru au public5, qui a lu d’abord toutes les imperfections et les fautes dont il est remply6 ; que doit-on espérer du reste ? Une


5. Commencé en 1637, le Dictionnaire ne fut achevé qu’en 1694. V. notre article Dictionnaire dans l’Encyclopédie du XIXe siècle.

6. Les académiciens eux-mêmes reconnoissoient l’imperfection de leur œuvre, et, bien plus, l’impossibilité de faire mieux, si la méthode suivie pour le premier travail, et maintenue pour les éditions qui se succédèrent jusque vers 1740, n’étoit pas abandonnée. Un mémoire adressé à l’abbé Bignon par l’abbé d’Olivet en janvier 1727, et publié, d’après le manuscrit, dans l’Athenæum du 10 septembre 1853, prouve assez la mauvaise opinion qu’on avoit du Dictionnaire dans la partie saine de l’Académie. « Le Dictionnaire, dit donc d’Olivet, ne vaut rien dans l’état où il est, et, quand on y travailleroit cent ans, on ne le rendra jamais meilleur, à moins qu’on n’y travaille d’une manière toute contraire à celle qu’on a suivie jusqu’à présent. On s’assemble dix ou douze, sans savoir de quoi il doit s’agir ; on y propose au hasard, selon l’ordre d’alphabet, deux ou trois mots à quoi personne n’a pensé. Il faut faire la définition de ces mots, faire entendre leur signification et leur étendue, et donner des exemples ou des phrases qui fassent voir les diverses