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à ſes Compatriotes.

ait d'aſſez mal intentionnés pour vouloir s'efforcer d'arracher de la main du Pauvre, le Pain que j'y ai mis. C'eſt à eux à qui je dis : croyez-en plutôt des Seigneurs de Paroiſſes, des Prélats bienfaiſans, des Curés charitables, qui après avoir nourri pendant l’Hyver dernier, leurs Vaſſaux & leurs Paroiſſiens, avec le Pain de Pommes de terre, en ont conſigné les bons effets dans les Papiers publics, afin d'en atteſter la vérité, de la faire connoître & d'engager les autres à ſuivre leur exemple.

Voila ceux qu'il faut croire, puiſqu'ils parlent d'après l’expérience & avec connoiffance de cauſe, & non pas ceux qui n'ont décidé que d'après des préjugés ou des erreurs, & qui prononcent un Arrêt déciſif contre les Pommes de terre, ſans en avoir jamais ni mangé, ni même vu. Que ne m'eſt-il permis de nommer ici des Gentilshommes, des Magiſtrats, de vrais Citoyens, dont les lumières & l’équité ſont également connues ! Si le même principe qui les a fait agir, leur permettoit de publier leurs bienfaits, ils atteſteraient eux-mêmes combien leur bienfaiſance a été ſecondée & augmentée par la diſtribution du Pain de Pommes de terre, & combien ceux qui en ont profité, s'en ſont bien trouvés ; un de ceux-là, dont la naiſſance, moins encore que ſon amour connu pour le bien public, qui, à la ſatiſfaction de cette Ville, vient de réunir les ſuffrages de ſes Concitoyens, s'eſt mis bien en état par l’expérience, de détromper tous ceux qui ſont dans Terreur à ce ſujet.

Mais que peut-on ajouter aux preuves reconnues de l’avantage de cette utile culture qui commence à germer & à réuſſir ſi bien, & qui s'étend de plus en plus, depuis deux ans, dans cette Province, qui ſûrement par la ſuite en reconnoîtra encore mieux les bons effets & les avantages ? Elle eſt utile, elle eſt facile, elle ne manque jamais ; les vents, les orages qui ravagent les grains, & font perdre en un inſtant au Cultivateur déſolé, les fruits de ſes travaux & de ſes eſpérances, ne peuvent lui nuire ; la grêle même qui écrase, qui ruine les autres productions de la terre, ne peut endommager cette moiſſon ſouterraine qui eſt à l’abri de tous les