Page:Varenne de Beost - La cuisine des pauvres, 1772.djvu/16

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
8
Avis contenant la manière de ſe nourrir bien

Celles au contraire pour qui cette même doſe deviendroit trop conſidérable, pourront la réduire à proportion de leur nombre ; mais le parti le plus avantageux en pareille circonſtance, ſeroit que pluſieurs familles du voiſinage, priſſent le parti de ſe réunir pour faire cette cuiſine en commun ; elles épargneroient par ce moyen, & du tems & du bois, pour cuire les matières ; on en prépareroit aiſément quatre cent cinquante livres à la fois ; quantité ſuffiſante pour nourrir cent perſonnes pendant quatre jours. Il est vrai qu’il faudroit pour cela, un aſſez grand vaiſſeau ; mais outre qu’il y a peu de Villages où il ne ſe trouvât quelque chaudière capable de contenir ladite quantité, les avantages qu’on retireroit de cette réunion, mériteroient bien que l’on fit quelques efforts pour ſe procurer de pareils vaiſſeaux.

On devroit ſur-tout, pratiquer cette méthode dans les Villages où il y a beaucoup de Pauvres, qui ne vivans que d’aumônes, n’ont pour la plupart, ni chaudron ni marmite, ni aucun vaſe propre à faire de la ſoupe, & qui ne pourroient par conſéquent, retirer aucune utilité de l’avis que nous leur donnons. Ils mourroient de faim & de miſère à côté même des facilités qu’on leur préſente ici pour leur ſauver la vie.

Les Couvents, les Maiſons de Fondations pieuſes, feroient très-bien d’avoir de notre compoſé tout prêt, en grande quantité, afin de ſe trouver ſans ceſſe en état de ſoulager les Pauvres de leur voiſinage ; car ce n’est pas ſeulement une loi générale de l’humanité, un précepte eſſentiel de la Religion Chrétienne, un devoir naturel de la Charité, de venir aux ſecours des malheureux. Notre intérêt nous y convie pour le bien général de la Société : en faiſant donner aux Pauvres, notre préparation, on épargne les quatre cinquièmes ſur leur nourriture ; ou, ce qui est la même choſe, quatre francs ſur cent ſols.

9°. Mais pour que les Pauvres Paſſagers, les Voyageurs indigents pussent auſſi profiter de cette économique compoſition, nous invitons les Cabaretiers à en tenir, & à la laiſſer à un prix