Page:Varenne de Beost - La cuisine des pauvres, 1772.djvu/15

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
7
& à bon marché, malgré la cherté des Vivres.

ſécher de nouveau au four ou autrement, avant d’en faire uſage ; cette précaution les rendra plus ſaines & plus propres à être réduites en bouillie. Au défaut de Beurre, le Lait peut être employé avec ſuccès : le Lard ſeroit encore meilleur ; mais si l’on avoit quelque piece de viande à faire bouillir avec le Riz, cela donneroit le dernier degré à notre compoſé.

7°. Comme la méthode que l’on indique, est auſſi facile à ſuivre, que peu diſpendieuse, il y a apparence qu’elle préviendra déſormais, toute eſpèce de murmures de la part du Peuple, dans le cas de diſette. Nous répétons qu’elle convient également aux Vieillards décrépits, & aux Enfants en très-bas âge ; de ſorte que par une ſuite ordinaire de la ſageſſe de la Régence, & avec l’aide des Couvents, des Bailliages, des Fondations pieuſes, & l’aſſistance des Gens de bien, la miſère de nos Pauvres, va ſans doute ſe trouver conſidérablement ſoulagée, & ils n’auront plus à redouter les cruels ravages de la famine.

8°. Les familles nombreuſes s’entretiendront au poids marqué.

    ſentées comme utiles à la Société, a trouvé celle-ci trop intéreſſante pour négliger d’en faire part au Public. On ne ſera pas fâché de retrouver ici ce qu’il en a dit cette année (1772,) dans ſes Feuilles hebdomadaires des Affiches, Annonces & Avis divers, On y lit ces mots, pag. 51.

    « Un Particulier de Provins, a fait cuire dans l’eau, un tiers de Pommes-fruits, (non de Pommes racines ou de terre.) qu’il a fait écraſer toutes chaudes dans deux tiers de Farine, y compris le levain. Le tout a été pétri ſans eau, le ſuc des Pommes ayant ſuffi. Quand ce mêlange a été en conſiſtance de pâte, on l’a mis dans une ſébille, ou jatte de bois, où il a levé pendant la nuit, c’est-à-dire, dans un eſpace de douze heures. On l’a mis au four ; il en eſt ſorti un Pain qui n’avoit aucun goût de fruit ; avantage que n’a pas le Pain où il entre des Pommes de terre Ce Pain étoit frais, léger, plein d’yeux, de facile digeſtion. On a obſervé qu’après la cuiſſon, le tiers de Pommes avoit produit ſon tiers de poids dans la totalité du Pain. Cette méthode eſt donc une reſſource utile, peu diſpendieuse & ſaine, pour les temps de diſette ou de cherté des Grains, quelle qu’en ſoit la cauſe, l’inclémence du Ciel, ou l’avarice des Hommes. »

    M. de Querlon, nous atteſte, d’aprés ſa propre expérience, dans ſa vingt-unieme Feuille, que le Pain économique, annoncé dans la treizième Feuille, eſt tout-à-la fois appétiſſant, nourriſſant, rafraîchiſſant, d’un goût agréable ; qu’il a paru tel à pluſieurs perſonnes auxquelles il en a fait goûter ; & qu’un enfant de trois ans & demi, qui en a mangé, en a redemandé pluſieurs fois, le croyant une eſpèce de gâteau, l’a digéré tout auſſi facilement que le Pain auquel il est accoutumé.