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Ayant jeté ce coup d’œil rapide sur la société de la Restauration, je crois devoir revenir aux amours de diligence dont il est question à ce début de chapitre, et m’inspirant de la littérature de 1825 à 1830, où il n’est pas rare de voir l’insenséisme et l’infamie noyés dans la sentimentalité, comme un diable dans un bénitier, je ne craindrai pas de conter ici une histoire vraie, inédite et troublante que je m’en vais con- duire en poste et sans trop d’arrêt à son dénouement, en laissant retentir le bruit des grelots, d’un style de convention si profondément cher à nos pères.

Par une belle matinée de juin 18.., le bureau correspondant de messageries royales établi à Angers était en grande agitation. La diligence, sur le départ, était assaillie de voyageurs ; les colis et les longues malles recouvertes de peau encombraient la cour, et cependant la bâche semblait déjà regorger d’objets divers. Une petite bande de comédiens sous la direction du fameux Mondor, célèbre de Tours à Bordeaux, avait marqué ses places à l’intérieur et dans la rotonde ; deux soldats en congé et un voyageur de commerce s’apprêtaient à occuper la banquette ; seul le coupé était encore vide et fermé. A travers les portières ou sur les marchepieds, on échangeait des adieux, des recommandations, des promesses ; les chevaux, attelés, attendaient tête basse l’impulsion des rênes ; déjà les dernières boîtes