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Je compte que vous y joindrez de votre part toutes les instructions que les circonstances vous feront juger nécessaires. Je suis bien persuadé que je n’ai rien à prescrire à votre zèle ; mais si le désir de m’être agréable peut l’accroître, soyez sûr qu’on ne peut mieux me servir et me plaire qu’en préservant les peuples de tout malheur, et par-dessus tout de celui d’être coupables dans un moment où, pour leur intérêt même, il ne me serait pas permis d’user d’indulgence. La présente n’étant à autre fin, je prie Dieu, monsieur, qu’il vous ait en sa sainte garde. Écrit à Versailles, le 9 mai 1775.


Instruction, envoyée par ordre de Sa Majesté à tous les curés de son royaume, et jointe à la lettre précédente.

Sa Majesté a ordonné que les brigandages qui dévastent ou menacent plusieurs provinces de son royaume fussent réprimés par des punitions promptes et sévères. Mais, si elle a été forcée d’y avoir recours pour diminuer le nombre des coupables et en arrêter les excès, elle est encore plus occupée d’empêcher qu’aucun de ses sujets ne le devienne, et si elle peut y parvenir, le succès de ses soins sera d’autant plus consolant pour elle, qu’elle est plus vivement affligée des mesures rigoureuses que les circonstances ne lui permettent pas de négliger.

C’est dans cette vue que Sa Majesté a jugé à propos de faire adressera présente instruction aux curés de son royaume.

Elle a déjà éprouvé l’utile influence de plusieurs d’entre eux, dans des paroisses dont quelques habitants, entraînés à la révolte par des impressions étrangères, mais ramenés par les exhortations de leurs pasteurs à leur devoir et à leur véritable intérêt, se sont empressés de remettre eux-mêmes les denrées qu’ils avaient enlevées, et de porter aux pieds des autels le repentir de leurs fautes, et des prières ferventes pour le roi, dont on avait osé, pour les séduire, insulter et rendre suspecte la bonté.

Sa Majesté se promet le même zèle des autres curés de son royaume. La confiance des peuples est le prix naturel de leur tendresse, de leur affection et de leurs soins ; et, lorsqu’aux vérités saintes de la religion, qui proscrit tout trouble dans l’ordre public, et toute usurpation du bien d’autrui, ils joindront la terreur des peines imposées par les lois civiles contre le vol et la sédition, des