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Quand on adopterait le calcul le plus bas, fait d’après la comparaison vague du total des impositions avec le revenu de la province indiqué par les rôles du vingtième, elle serait toujours surchargée de 6 pour 100 du produit total. Pour la réduire à 33 pour 100, il faudrait diminuer les impositions de six trente-neuvièmes, c’est-à-dire de 575,000 liv., distribuées partie sur la taille, partie sur le fourrage et sur la capitation, au prorata du montant de ces différentes impositions : ce serait sur la taille 340 à 350,000 liv., qu’il me paraît juste (j’ose le dire) de retrancher à perpétuité des impositions de la généralité de Limoges, indépendamment des grâces que le roi a la bonté d’accorder aux provinces qui ont souffert d’accidents particuliers, et auxquelles elle ne méritera pas moins de participer lorsqu’elle sera rétablie dans sa véritable proportion.

On peut soulager beaucoup la généralité de Limoges, sans charger d’une manière très-sensible les autres provinces, sur lesquelles il serait nécessaire de répartir ce qu’on lui ôtera. Une somme de 6 à 700,000 fr., répartie sur huit à dix provinces, fait un objet modique pour chacune ; et cette répartition est juste, puisqu’elle n’est que le rétablissement de l’égalité, que le gouvernement a toujours voulu observer entre tous ceux qui doivent contribuer aux charges de l’État.

Il est indubitable que les provinces qui environnent la généralité de Limoges, surtout la Saintonge et le Périgord, supportent beaucoup moins d’impôts qu’elle. Les provinces de grande culture, beaucoup plus riches, sont probablement les moins chargées de toutes à raison de leur revenu : ainsi, l’on ne doit pas être embarrassé de placer la diminution qu’on accorderait à la généralité de Limoges. Je sais qu’on a souvent répondu aux plaintes des habitants du Limousin sur le peu de proportion de leurs impositions avec celles des provinces voisines, qu’il est vrai qu’ils étaient très-chargés de tailles, mais que, comme ils n’avaient ni aides ni gabelles à payer, la plus forte proportion de leurs impositions territoriales était une compensation naturelle et juste de l’exemption de ces deux autres genres d’imposition. Mais les Limousins peuvent répondre, en premier lieu, que les provinces de Saintonge et du Périgord ne sont pas plus sujettes à la gabelle que le Limousin ; qu’à l’égard des aides, l’Angoumois y est sujet, mais que cette imposition n’est guère plus considérable en Saintonge, et que le Périgord en est entièrement