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de la taxe à laquelle sont assujettis les domaines du Limousin avec celles que supportent des domaines de pareille valeur en Poitou, en Saintonge, en Périgord, provinces qui sont affranchies de la gabelle comme le Limousin ; surcharge prouvée par l’empressement des contribuables à choisir par préférence leur domicile dans les provinces voisines ; surcharge telle, qu’en comptant les vingtièmes le roi tire de presque toutes les terres plus que le propriétaire, c’est-à-dire plus de la moitié, et quelquefois les deux tiers du produit net[1].

Le second motif était les accidents généraux de grêle et la médiocrité de la récolte dans une grande partie de la province.

Le troisième motif était la grêle extraordinaire accompagnée d’ouragans, qui avait tellement ravagé plusieurs paroisses des environs d’Angoulême, que non-seulement la récolte entière de l’année a été anéantie, mais que les vignes, les arbres et les bâtiments ont été endommagés pour plusieurs années. La décharge qu’il a été nécessaire d’accorder à ces paroisses sur l’imposition de 1765 a absorbé 80,000 francs du moins imposé que Sa Majesté avait bien voulu accorder.

De ces trois motifs, le premier subsiste dans son entier, et subsistera probablement jusqu’à ce que, par un travail très-long et très-difficile, et dont les principes sont même très-peu connus, le gouvernement ait pu se procurer des moyens suffisants pour comparer, en connaissance de cause, les forces des différentes provinces du royaume.

Il résulte du compte que nous venons de rendre de la situation de la province et de ses productions, que cette situation n’est pas en général plus avantageuse que l’année dernière, et que la partie du Limousin souffrira au moins autant du défaut général de ses récoltes de 1765 à 1766, que celle de l’Angoumois avait souffert de 1764 à 1765. La seconde considération qui avait engagé le roi à traiter favorablement la province en 1765 subsiste donc dans toute sa force, et doit faire espérer que Sa Majesté voudra bien lui continuer les mêmes bontés.

À l’égard du fléau particulier qu’un certain nombre de paroisses

  1. M. Turgot croyait devoir répéter à cet égard, presque dans les mêmes expressions, ce qu’il avait exposé l’année précédente. — Il disait comme Voltaire : « Il faut bien que je me répète puisqu’on ne m’a pas entendu. » (Note de Dupont de Nemours.)