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le sieur Le Clerc, à celle de cotonnades du sieur Nadal à Angoulême, et à celle de lainages anglais des sieurs Piveteau-Fleury dans la même ville.

Quant à ce qui concerne les sieurs La Forêt, je m’étais déterminé à proposer pour eux ce titre pour deux raisons : l’une que, perdant le privilège exclusif qu’ils avaient eu jusqu’alors, il me paraissait dur de les priver en même temps d’une décoration dont ils jouissaient ; l’autre était que, la lettre ministérielle qui leur a donné cette décoration n’ayant rien de commun avec l’arrêt qui leur conférait le privilège exclusif pour vingt ans, son effet ne paraissait pas devoir expirer en même temps que cet arrêt : la lettre de M. le contrôleur-général, du 16 septembre 1748, qui leur accorde cette grâce, n’y a même fixé aucun terme, et je trouvais qu’en la leur confirmant pour un temps limité, on se rapprochait du droit commun sans rejeter tout H fait leur titre.

C’est à vous, monsieur, à peser ces raisons et à juger si elles vous paraissent suffisantes pour balancer la répugnance que vous avez à multiplier le titre de Manufacture royale. Si vous ne le pensez pas, je n’insisterai point sur cet article, et je m’en rapporte à ce que vous déciderez.

Vos observations sur l’exemption des droits d’entrée et de sortie du royaume, et de la circulation dans l’intérieur, tant pour les étoffes fabriquées que pour les matières premières, sont entièrement conformes à ma façon de penser : vous êtes d’ailleurs d’avis d’accorder aux sieurs La Forêt l’exemption qu’ils demandent à cet égard ; ainsi, je crois superflu de m’étendre sur cet article.

Vous pensez différemment sur l’exemption demandée des droits que payent les cotons filés tirés de l’étranger, et vous regardez ces droits comme le seul moyen de rendre la filature générale en France, et de la porter rapidement à sa perfection.

Je crois, monsieur, que ce moyen de favoriser un genre d’industrie dans le royaume par des droits sur les productions de l’industrie étrangère, serait susceptible de bien des considérations. Je vous avoue que, dans ma façon de penser particulière, une liberté entière, indéfinie, et un affranchissement total de toute espèce de droits, seraient le plus sûr moyen de porter toutes les branches de l’industrie nationale au plus haut point d’activité dont elles soient susceptibles, et que les productions étrangères que cette liberté indéfinie