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L. Questions sur quelques points d’histoire. — Ce que j’ai lu dans un recueil de lettres édifiantes, d’une synagogue de juifs établis dans la province de Hou-quang, et qu’on prétendait être venus à la Chine avant Jésus-Christ, a-t-il été vérifié ? On prétendait même qu’ils n’avaient pas tous les livres de l’ancien Testament. Si cette idée avait quelque fondement, il serait très-intéressant qu’on pût avoir une copie exacte et figurée de leurs livres saints en hébreu. Si on pouvait la faire faire par quelque bon copiste qui copiât bien la figure des lettres, il serait peut-être peu coûteux de la faire tout de suite imprimer à la Chine, et la chose en vaudrait la peine. On en verrait avec plaisir les exemplaires en Europe.

LI. Les Miao-tsées, peuple non soumis, qui sont encore dans quelques montagnes de la Chine, ont-ils quelque commerce avec les Chinois ? Y a-t-il des Chinois qui aillent dans leur pays et qui sachent leur langue ? Cette langue est-elle, comme celle des Chinois, composée de mots d’une seule syllabe diversement combinés, ou de mots de différentes longueurs, comme les langues des Européens et de presque toutes les nations[1] ? La physionomie et la couleur de ces peuples ressemble-t-elle à celle des Chinois des provinces où ils sont enclavés ? Sait-on quelque chose des raisons qui ont empêché jusqu’ici qu’ils n’aient pu être soumis à l’empire chinois ?

LII. Les Tartares-Mantchoux et autres soumis à l’empereur de la Chine commencent-ils à prendre des mœurs plus approchantes des mœurs chinoises, à demeurer dans les villes, à s’adonner moins à la chasse, et davantage à la culture de la terre et aux arts ? Les deux derniers empereurs, plus éloignés de l’origine tartare, ne sont-ils pas devenus plus Chinois, et pour la manière de vivre, et pour la manière de penser, que leurs prédécesseurs ?

fin des questions sur la chine.
  1. Il existe à la Chine, 1o un idiome écrit, langue savante qui n’a jamais été parlée, et qui ne peut l’être, parce qu’elle est purement idéographique ; il y joue le même rôle qu’en Europe, durant le seizième siècle, la langue latine ; tous les ouvrages d’histoire, de philosophie, de jurisprudence, etc., sont écrits dans cet idiome ; — 2o une langue orale, que parlent, écrivent et entendent, d’un bout de la Chine à l’autre, tous ceux qui ont fréquenté les écoles du gouvernement ; — 3o et dans chaque province, un idiome local, qui dérive de la langue commune, et qui n’est à proprement parler qu’un patois à l’usage des dernières classes du peuple, affecté de différences si profondes dans la prononciation, qu’il est souvent inintelligible d’un district à l’autre. (E. D.)