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LE CONTEUR BRETON

ne faudrait donc pas que quelqu’un se présentât pour m’embrasser, ni homme, ni femme, car ce serait la pire chose qu’il pourrait faire en sa vie.

Quand elle fut descendue dans la maison, celle-ci, qui avait emporté de l’or et de l’argent, donna quelques objets précieux à tous les gens de la maison, aussi bien aux servantes qu’aux valets, ainsi qu’est la coutume quand quelqu’un se marie.

Jusqu’à présent je n’ai pas encore dit que cette fille était jolie et belle quand elle avait quitté la maison ; ou, si je l’ai dit, (je dois ajouter) que sa beauté d’alors n’était rien en comparaison de sa beauté actuelle ; et ce qui étonnait tout le monde, c’était de la voir avec une bête si horrible et si hideuse. Ceci fit dire à deux jeunes gens qui étaient à la noce que c’était péché mortel de la voir ainsi à la suite d’une bête si étrange, sans que personne pût l’embrasser. — Assurément, je le ferai, dit l’un d’eux, quand bien même je saurais perdre la vie. — Prends garde, dit l’autre, tu pourrais t’en repentir ensuite ! — Tant pis, je l’ai mis dans ma tête, et je ferai comme je le dis.

Voilà celui-ci aussitôt qui va se cacher dans les escaliers, pour mieux faire son coup quand viendrait la jeune fille. Il eut beau faire, il fut aperçu par celle-ci, qui lui dit : — Si vous vous plaisez dans vos vêtements[1], sortez de là, puisque je

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  1. Pour dire : Si vous n’êtes pas pressé qu’on vous mette dans un linceul, si vous n’êtes pas fatigué de vivre.