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Nous sommes si disposés, tous tant que nous sommes, à être généreux dans la chaleur entraînante des premiers moments d’émotion et si disposés aussi à être froidement justes, — si tant est que nous restions froidement justes, — pendant les longues années de la vie ordinaire !

La famille reprit son train accoutumé. On défit les paquets qu’on avait commencés ; on ne donna pas suite aux arrangements préliminaires qui devaient permettre de vivre avec la plus stricte économie ; le poney qui devait être vendu, et qu’on engraissait à cet effet avec de l’orge bouillie, dut se contenter de sa ration ordinaire ; on révoqua le congé donné à la vieille gouvernante ; il en fut de même à l’égard du jardinier. On ne saurait dire avec quelle promptitude le nouveau ministre prit la place du défunt aux yeux des habitants de Hurst-Staple. Si M. Wilkinson père avait pu sortir de son tombeau au bout de trois mois, force lui eût été de reconnaître qu’il n’avait pas laissé un grand vide. Une élégante tablette de marbre rappelait sa mémoire, et tout était dit. Le bonnet de veuve de madame Wilkinson donna d’abord, il est vrai, un aspect étrange au cercle de famille ; mais c’est singulier, comme l’œil s’habitue à tout, — même à la vue d’un bonnet de veuve !

Quelques visites de condoléance avaient été échangées entre Hurst-Staple et West-Putford, et les sœurs d’Arthur Wilkinson avaient souvent vu Adela. Mais les promenades d’Arthur au bord de la rivière n’avaient pas été fréquentes. Personne, du reste, n’en fit la