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Et il allait renoncer à tout cela ! Et pourquoi ? Tout ce qu’il avait là devant lui, tout ce qui lui avait paru, ce qui lui paraissait encore la forme de beauté la plus parfaite que le monde pût offrir, tout cela était encore à lui, et il était libre de n’y pas renoncer. Il connaissait assez Caroline pour être sûr que, si changés que pussent être ses sentiments, elle ne daignerait pas manquer à la parole donnée. Elle l’épouserait encore, — dans quelques mois s’il le voulait. Et belle comme elle l’était, lui appartenant encore, et malgré tout l’amour qu’il lui portait, il était venu là pour se séparer d’elle ! Toutes ces pensées lui traversèrent l’esprit comme un éclair. Mais il ne perdit pas un instant en réflexions inutiles.

— Caroline, dit-il en lui tendant la main — d’ordinaire, en lui prenant la main, il l’attirait tendrement vers lui, mais cette fois il n’en fit rien — Caroline, je suis venu pour m’expliquer avec vous. Il y a quelque chose entre nous qui doit être éclairci.

— Eh bien ! qu’est-ce ? dit-elle avec un sourire presque imperceptible.

— Je ne voudrais pas, si je puis l’éviter, dire un mot qui montrât que je suis fâché…

— Mais êtes-vous fâché, George ? Si vous l’êtes, ne vaut-il pas mieux le laisser voir. Vous ne saurez jamais bien feindre.

— Je l’espère bien, et je ne feindrai jamais volontiers. C’est parce que je n’aime pas à feindre que je suis venu.

— Vous ne sauriez rien cacher, George, quand bien