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indifférent qu’on le blâmât ou qu’on l’approuvât. Il ajoutait qu’il était tout prêt à se démettre de son titre d’agrégé, si l’on tenait à se débarrasser de lui au Collège d’Oriel.

L’affaire en resta là pour le moment. Ceux qui connaissaient le mieux Bertram ne doutèrent pas que sa foi fût ébranlée, quelque énergiques que fussent les dénégations de sa préface. Ses protestations étaient sincères, mais il n’est pas donné à chacun de savoir tout au juste ce qu’il croit. Que dis-je, à chacun ? Est-il quelqu’un au monde, devrait-on plutôt dire, qui sache tout à fait à quoi s’en tenir sur sa foi ? Que de gens croient, ou prétendent croire, par exemple, à « la résurrection de la chair ! » Mais qu’entendent-ils par ces mots ?

On peut être très-croyant, et cependant mettre en doute certaines assertions de la Bible, ou du moins se refuser à les entendre dans un sens littéral ; mais des hommes très-croyants n’emploieront pas volontiers toute leur éloquence à rendre publics leurs doutes. Ces hommes-là, s’ils consacrent leur temps à l’étude de l’histoire biblique, ne s’arrêteront pas à un incident comme celui du soleil demeurant immobile au-dessus de la montagne de Gibéon. Ils aimeront mieux proclamer tout ce qu’ils croient que de parler du peu dont ils doutent. Les amis de Bertram durent s’avouer que ceux qui le traitaient de libre penseur ne lui faisaient pas injustice.

Ces choses, et d’autres encore, faisaient beaucoup de chagrin à nos deux dames de Littlebath. Quant à mademoiselle Baker, la seule pensée que George avait