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sant autrement, elle se serait montrée peut-être plus prudente encore.

En allant en Écosse, Bertram s’arrêta, comme il l’avait dit, à Littlebath, et il y passa trois jours. Il s’était décidé en route à ne parler à Caroline de leurs dernières lettres échangées que si elle abordait la première cette question. De son côté, celle-ci avait pris la même résolution, et comme ils tinrent bon l’un et l’autre, il arriva que pas un mot ne fut dit à ce sujet. Ce silence satisfit pleinement Caroline, et nullement Bertram. En son cœur il l’accusa de nouveau d’être froide et insensible — « aussi froide que belle, » se dit-il en rentrant le soir à l’hôtel de la Charrue.

Les trois jours que nos amoureux passèrent ensemble à Littlebath parurent s’écouler assez agréablement. Ils montèrent à cheval ensemble, ils se promenèrent ensemble, ils dansèrent même ensemble un soir ; que dis-je ? ils causèrent beaucoup ensemble, et mademoiselle Baker crut que tout allait pour le mieux. Mais Bertram, en se remettant en route pour l’Écosse, se dit que Caroline était bien indifférente, et se demanda tout bas si réellement elle l’aimait.

— « Écrivez-moi, je vous prie, et donnez-moi des nouvelles de votre chasse, lui avait-elle dit au moment du départ. » La chasse ! quel sujet à choisir pour les lettres d’un amoureux ! Elle ne lui avait pas dit : Écrivez, écrivez souvent ; et toujours en écrivant, redites-moi que vous m’aimez.

— Oui, oui, j’écrirai, avait répondu Bertram en