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et je ne compte nullement le consulter. Dans ma position, ce serait une indélicatesse.

— Comment ! une indélicatesse que de consulter le seul parent qui puisse faire quelque chose pour vous ?

— Oui. Il m’a répété cent fois que je n’avais aucun droit sur lui ; aussi n’en ferai-je pas valoir.

Bertram s’était dit cent fois que l’opinion de Harcourt, en matière de sentiment, lui serait indifférente ; mais après ce qui venait de se passer, il ne put s’empêcher de désirer qu’il vît Caroline. Il se doutait bien, — mais plutôt d’après le ton plutôt que d’après les paroles de Harcourt, — que ce clairvoyant ami n’avait qu’une pauvre opinion de mademoiselle Waddington, et par cette raison même il tenait à l’éblouir et le surprendre en lui montrant sa beauté et son esprit. Il se promit de ne pas la décrire à l’avance, afin que l’éblouissement fût plus complet.

— Il vous faudra venir avec moi à Littlebath. Quel jour pouvez-vous me donner ? dit-il à son ami.

Harcourt refusa d’abord. Il ne voulait pas être condamné à vanter une femme qu’il supposait ne pas devoir lui plaire ; aussi tâcha-t-il d’échapper à la corvée. Mais Bertram tint bon, et il fut enfin convenu qu’ils iraient ensemble à Littlebath.

Tout ceci se passait vers la fin de l’hiver. Dans l’intervalle, mademoiselle Baker avait, selon sa promesse, vu M. Bertram, et la réponse de l’oracle de Hadley, comme presque toutes les réponses d’oracle, avait été fort ambiguë. Le vieillard n’avait montré ni colère ni plaisir en apprenant ce qui s’était passé. — C’est égal,