Page:Trollope - Les Bertram, volume 1.djvu/218

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

son aise lui-même, et laisse aussi faire les autres.

— Justement.

— Et ce n’était pas là ce que vouliez. S’il avait eu l’air de croire qu’un père et un fils sont des êtres d’ordres tout différents, s’il vous avait traité moins familièrement, s’il s’était montré plus imposant, si, au dessert, il vous avait passé la bouteille avec une nuance plus marquée de sévérité et d’autorité paternelle, vous l’auriez mieux aimé, avouez-le ?

— Non, je ne l’aurais pas mieux aimé ; mais cela m’eût peut-être semblé plus naturel.

— C’est ce que j’entends. Mon cher ami, vous avez été à la recherche d’un papa avec les sentiments d’un petit garçon ; et le papa, qui ne vous cherchait pas du tout, lui, vous a pris, lorsqu’il vous a rencontré, pour ce que vous êtes : un homme.

— Tout ce que je sais, c’est qu’il a été enchanté de me voir.

— J’en suis persuadé, et je crois, de plus, qu’il doit être très-fier de vous, maintenant qu’il vous connaît. Je n’ai jamais supposé que le brillant colonel fût dépourvu d’entrailles. Avez-vous fait quelque arrangement avec lui pour les questions d’argent ?

— Non, — aucun.

— Vous n’avez pas soufflé mot de ce prosaïque sujet ?

— Je ne dis pas cela, il était tout simple d’en parler. Mais, pour ce qui est de l’argent, je vous dirai que mon père se tire d’affaire de son côté, et moi du mien, du mieux que nous pouvons.