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et Carmel ; mais, arrivé là, il n’y tint plus. Sa conscience, dit-il, ne lui permettait pas de rester plus longtemps absent de ses devoirs officiels. Il découvrit qu’il était tout près de Beyrout ; qu’il pourrait s’y rendre à cheval en deux jours sans passer à Damas. La cuisine du mont Carmel ne le raccommoda pas avec la Terre sainte. Enfin il s’aperçut qu’il était un peu souffrant. Il rappela à George en riant qu’à vingt-trois ans on est plus jeune qu’à soixante ; bref, il refusa tout net de retourner en arrière pour voir la mer de Galilée. « Mais, ajouta-t-il, si George en avait vu assez, combien il serait heureux de l’avoir pour compagnon de route jusqu’à Jérusalem ! »

Rien ne put ébranler George : il voulait voir Nazareth. Le père et le fils se séparèrent donc en se donnant rendez-vous à Constantinople. Nous ne les suivrons ni l’un ni l’autre. Sir Lionel, dont toute la dépense avait été payée, arriva sur les rives du Bosphore avec la bourse bien garnie, espérons-le. George, demeuré seul, voyagea lentement, songea beaucoup à tous ces lieux vénérés qu’il visitait, — et beaucoup aussi à son amour. Il se sentit bien tenté de retourner sur ses pas pour retrouver mademoiselle Baker et Caroline, mais une sorte de mauvaise honte le retint.

Quinze jours après le départ de son père, George était à Damas ; et, huit jours plus tard, il s’embarquait sur le paquebot de Beyrout. En quittant la Palestine, il ne se sentait pas heureux. Il avait subi pendant un court espace de temps la puissance d’une influence spirituelle et s’était promis de consacrer sa vie à une sainte