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compte, elle se trouvait condamnée à présider une nombreuse et joyeuse société réunie pour festiner et se divertir auprès de la cendre de saint Jacques le Juste.

Il n’y a que les Anglais pour faire de pareilles choses. La crânerie des autres peuples ne va pas jusque-là ; il leur manque pour de telles entreprises un certain mélange de drôlerie, d’indépendance de caractère et de mauvais goût. Entrez dans une église du continent, — en Italie, par exemple, où les tableaux des grands maîtres ornent encore les murs des églises, — regardez cet homme debout sur les marches de l’autel même où le prêtre dit une messe ; voyez-le avec sa veste de chasse grise, ses gros souliers, son chapeau de feutre sous un bras, sa canne sous l’autre, tandis qu’il regarde à travers sa lorgnette ! Comme il se remue pour trouver le meilleur point de vue, — également insoucieux du prêtre et des laïques ! La sonnerie, les coups d’encensoir, les génuflexions, tout cela lui est indifférent : il a payé fort cher pour arriver là ; il a payé le guide qui est agenouillé à quelques pas derrière lui ; il compte payer le sacristain qui l’accompagne, il serait tout prêt à payer le prêtre lui-même, si celui-ci laissait entrevoir le désir d’être payé ; mais il est venu là pour voir cette fresque, et il la verra, coûte que coûte. Ajoutons que là-dessus, il en saura bientôt plus long que le prêtre et toute la congrégation mis ensemble. Quelque serviteur de l’église viendra peut-être tout à l’heure lui demander, avec des gestes respectueux et presque suppliants, de se retirer un instant. L’amateur des beaux-arts lui lancera un seul regard irrité et puis ne