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trottinent, se dandinent ou se traînent comme si leurs volants et leurs falbalas étaient une charge trop lourde ; mais, si ce n’est en Espagne, les femmes ne marchent guère. Sous ce rapport, notre héroïne valait une Andalouse.

Tels étaient les charmes extérieurs de mademoiselle Waddington, mais il faut dire aussi quelques mots des trésors intellectuels, de la marchandise morale, si j’ose m’exprimer ainsi, sur laquelle flottait le pavillon de sa beauté, car il y a autre chose, chez la femme, que le dehors, si beau qu’il puisse être. Il est vrai que bien des hommes ne regardent qu’à cela en se mariant, — qu’à cela, bien entendu, en sus de la fortune ; mais il arrive souvent, bien qu’ils n’aient cherché que cela, que le mariage fait, beaucoup d’autres choses s’imposent à leur attention, bon gré, mal gré ; et puisque Caroline Waddington doit occuper une place dans cette histoire, après comme avant son mariage, qu’elle sera non-seulement l’idole mais la compagne de l’homme, il n’est pas inutile de parler brièvement de son aptitude à remplir ce dernier rôle.

Disons donc que sa beauté était peut-être moins remarquable encore que sa force de caractère. Pour l’instant, elle n’a que vingt ans, et elle connaît à peine son pouvoir ; mais le jour viendra où elle le connaîtra et en usera. Elle possédait une volonté virile, opiniâtre et durable, capable de vaincre bien des obstacles et fort difficile à soumettre. Son esprit, bien dirigé, pouvait accomplir de grandes et belles choses, mais il était facile de prévoir qu’il ne resterait pas inactif, et que