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qui tâchent d’entrer et dix ou douze qui essayent de sortir, le combat ne laisse pas que d’être assez désagréable pour un Anglais ; mais, pour un Oriental, il n’y a peut-être là qu’une lutte pleine d’émotions.

Bertram n’eût jamais réussi sans l’aide de son drogman. Celui-ci se démena si bien au milieu de tous ces impatients, repoussant violemment ceux qui cherchaient à sortir et s’accrochant pour les retenir à ceux qui voulaient entrer, que le passage se trouva libre un instant, et notre héros, ayant baissé la tête, se trouva tout à coup dans l’intérieur, la main posée sur le marbre du tombeau.

Ceux qui l’entouraient lui parurent être le rebut du monde entier. C’étaient de ces hommes qu’on n’aimerait point à rencontrer, à moins d’être bien armé, sur les routes de la Grèce ou dans les collines de l’Arménie, — des misérables à mines de coupe-jarret, à la tête à demi rasée, à la barbe sale et aux yeux irrités, des hommes vêtus de peaux de bête ou de manteaux qui y ressemblaient, sales, puants, grouillants de vermine, empestés d’ail, abominables à des yeux anglais. Il y avait pourtant en eux une certaine dignité de maintien, une aptitude naturelle à se mouvoir avec aisance, et un sentiment inné de la couleur apparaissant au milieu de leur saleté. Malgré tout, ces chrétiens de l’Église grecque lui semblaient à peine des frères en religion.

Il posa cependant la main sur la pierre du tombeau, et dans le même moment deux frères, deux jeunes Grecs, — Grecs de croyance, veux-je dire, car Bertram