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Miss Marguerite comprit, se leva, pressa tendrement les doigts maigres de l’héritière, et la laissa enfin se livrer à ses graves occupations. Sophie avait l’habitude de se renfermer chez elle tous les jours, de deux heures à trois, pour se livrer à son occupation favorite : manger, et manger bon. Quoique très-avare, elle était fort gourmande, et l’obligation de dîner avec les cinq personnes auxquelles elle ne donnait que des plats communs, mal assaisonnés et souvent réchauffés, avait fait naître une idée lumineuse dans sa méchante tête. Chaque jour, à deux heures, l’adroite mistress Barnes lui apportait une galante collation qu’elle dévorait seule, tout à son aise, et servie par miss Roberts. Ce repas se composait des mets les plus recherchés, les mieux préparés, et accommodés par les propres mains de mistress Barnes, que celle-ci, avec sa maîtresse, passait chaque jour plusieurs heures à varier agréablement et à discuter longuement. Après le départ de miss Brandenberry, Sophie, entendant sonner deux heures, s’installa devant une petite table couverte d’une riche argenterie et d’un petit goûter superfin.




CHAPITRE XXV.


Sophie avait bien pris toutes ses précautions pour que personne ne pût venir la déranger de deux heures à trois. Elle avait ordonné à ses gens de ne laisser monter qui que ce fût auprès d’elle et sous aucun prétexte, et de renvoyer sans pitié les visiteurs indiscrets ou importuns. Ses recommandations à ce sujet sem-