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Si quelquesfois mes yeux ne peuuent reſister
Aux pauots, dont le ſomme acompliſt tous ſes charmes ;
Morphée ingenieux à me perſecuter
      Les tient touſiours trempez de larmes.
Il me vient effroyer auecque des alarmes
      Que ie ne ſçaurois ſoutenir ;
Las ! ie fremis encore à m’en reſſouuenir.

Ie vous voy ce me ſemble auec la maieſté
Qu’vne douceur tempere en voſtre beau viſage,
Me dire d’vn accent plein de ſeuerité
      Berger, ton ſoin m’eſt vn outrage ;
Ie ne puis t’eſcouter, ny te voir dauantage,
      Tous tes ſoupirs ſont ſuperflus,
Va-t’en loing de mes yeux & ne retourne plus.

Surpris d’estonnement & ſaiſi de douleur,
I’accuse vos rigueurs & le Ciel d’iniustice ;
Et ne voulant plus viure apres vn tel mal-heur,
      Ie cours vers vn grand precipice
Pour terminer mes maux par vn dernier ſuplice ;
      Et croy me lancer de ſi haut
Que d’horreur, en tombant ie m’eſueille en ſurſaut.