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Alors on pourra voir le règne de la vertu s’étendre sur la terre et avec la vertu seule ; nous pourrons espérer voir se réaliser ce désir de sage liberté, qui fait battre si ardemment tous les cœurs généreux et sublimes. Oui, la vertu et l’amour peuvent seuls réunir les masses ; et de leur réunion naîtra une force invincible. Aussi, nous osons le dire, la réalisation de notre projet fera connaître à l’homme sa puissance, lorsqu’il voudra s’appuyer sur la vertu. L’homme qui aime devient l’égal de Dieu ; que dis-je ! il peut faire plus que Dieu lui-même ! S’il le veut, il peut réunir sous une seule croyance[1], sous un seul espoir, cet univers si vaste, si beau, qui est son héritage, mais qui est déchiré par les divisions et les haines. Mes frères, abjurons toute odieuse rivalité, tout égoïsme de famille ou de nation ; que notre volonté ferme et constante nous fasse chercher le bonheur, qui, jusqu’alors, n’a été qu’un rêve, dans l’amour[2] et l’union ! Travaillons-y d’un commun accord, et nous le trouverons. Hommes, nous vous le répétons, nous pouvons faire plus que Dieu ; étendons notre philanthropie universellement, et ne formons plus qu’une seule et même famille. N’étions-nous pas hommes avant que d’être Anglais, Italiens ou Français ? Les limites de notre amour ne doivent pas être les buissons qui entourent notre jardin, les murs qui enceignent notre ville, les montagnes ou les mers qui bordent notre pays. Désormais notre patrie doit être l’univers. Jésus a dit : Vous êtes tous frères ! Faisons que la différence de nos costumes, de nos mœurs, en raison de chaque climat, au lieu d’être un motif de dispute et de haine continuelles, devienne une école mutuelle où chacun ira puiser la perfection. Hommes, aimons-nous, et le bonheur viendra habiter dans notre cœur ; mais, surtout, que jamais la parole du mépris ne vienne sur nos lèvres ; car celui qui dira racha[3] à son frère sera maudit par Dieu. Marchons donc hardiment vers ce noble but de perfecti-

  1. Nous n’entendons pas par croyance une seule et même religion, mais une seule et même pensée, celle de faire le bien. Le musulman et le juif sentent ce qu’il a de beau dans la vertu, comme le sent le chrétien.
  2. Nous croyons devoir expliquer que nous ne donnons pas au mot amour la seule acception qu’on lui a donnée jusqu’à ce jour : nous voulons dire amour de l’humanité, amour du bien, amour de la vertu.
  3. Paroles de la Bible.