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troupeau que l’ignominie a marqué ; si elles avaient su se vendre de bonne heure, elles ne seraient pas tombées à si bas prix, et ce seraient des femmes honorables !

Les malheureuses pour la plupart ont aimé et se sont laissé séduire ; elles n’ont pas eu le courage de l’hypocrisie parce qu’elles avaient un cœur.

Voilà ce que le monde en a fait. Voyez ce prêtre apostat qui meurt de misère ; s’il avait su mentir comme les autres et cacher ses vices sous une austérité haineuse, il serait peut-être évêque aujourd’hui !

Voyez ces forçats qui partent pour Brest ou pour Toulon, enchaînés deux à deux : ils ont volé avec trop de franchise. Oh ! s’ils avaient su faire leurs affaires !

Voyez cette pauvre femme du peuple qu’on vient d’arrêter pour avoir volé un pain : elle a été jeune et belle, mais elle a voulu être honnête. Un ouvrier brutal et fainéant l’a épousée et l’a rendue mère, puis il l’a délaissée avec ses enfants !

Ô moralistes ! que vous êtes beaux dans vos théories et puissants dans vos arguments !

Vous vous donnez bien de la peine pour former des gens vertueux, et puis voilà que la société