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prend en bonne, ou en mauvaise part : l’épithète qu’on y joint la détermine. Je me suis laissé tromper par l’accueil hypocrite que m’a fait ce rusé Courtisan. M. Scud. Les grands gagnent l’amitié des Peuples en faisant un bon accueil aux personnes qui les approchent. Il m’a fait un accueil froid, & désobligeant : j’en attendois un accueil plus favorable.

Accueil, seul & sans épithète, se prend d’ordinaire en bonne part. Il signifie la manière civile & honnête dont on reçoit une personne, & le secours qu’on lui donne. Faire accueil à tout le monde. L’accueil qu’a fait ce Seigneur à cet infortuné Gentilhomme en le retirant dans sa maison, lui a sauvé la vie & l’honneur. Son accueil charme tous ceux qui l’abordent.

AcCUEILLIR, v. act. Recevoir ceux qui ont à faire à nous, ou qui nous rendent quelque visite. Accipere, excipere leniter, amicè. Il l’accueillit avec des témoignages d’une grande tendresse. La première pratique de la civilité est de bien accueillir toutes sortes de personnes. On conj. J’accueille, tu accueilles, il accueille : j’accueillis ; j’ai accueilli ; j’accueillerai ; j’accueillerois, &c.

Sa maudite grimace est par-tout bien venue ;
On l’accueille, on lui rit ; par-tout il s’insinue. Mol.

Ce mot vient du Latin adcolligere. Ménag. J’aimerois mieux l’éviter en disant, Il m’a fait un bon accueil, ou si vous voulez, il m’a reçu très-favorablement. Accueillir est douteux.

Accueillir, signifie aussi, Donner secours, protection, retraite. Praesidium ferre. C’est une grande ingratitude de méconnoître dans la prospérité ceux qui nous ont accueillis, & qui nous ont secourus dans notre misère.

Accueillir, signifie encore plus particuliérement, Recevoir dans un Bateau, dans un Navire. Ce batelier n’est pas loin du port, il faut lui crier qu’il vous vienne accueillir. On envoya une barque pour accueillir ceux qui se noyoient après le débris de ce Vaisseau.

Accueillir, se dit figurément en choses morales. Occupare, adoriri. Il ne faut pas se laisser accueillir par la nécessité ; c’est-à-dire se laisser presser, & accabler par la misère. Nous n’étions pas loin du port, lorsque nous fûmes accueillis par la tempête ; c’est-à-dire, battus & surpris par l’orage. Le P. Bouhours blâme accueillir dans cette signification, d’autres soutiennent qu’il est bon. Il vaut mieux chercher un autre tour. L’Académie. Françoise ne fait aucune difficulté sur ce mot, dans la dernière édition de son Dictionnaire.

Accueilli, ie, part. & adj. Acceptus, exceptus.

AcCUL, s. m. l’L se prononce. Lieu étroit & bouché d’où on ne peut sortir quand on est poursuivi par les ennemis. Angustiæ. On le dit particulièrement à la chasse des lieux où on réduit le gibiér.

Acculs, sont aussi les lieux les plus enfoncés des terriers, où les renards ou bléreaux ont toute leur famille. Fundula. On appelle Carrefours, les principaux conduits ou creux qui mènent à leurs acculs. On appelle encore Acculs, en termes de chasse, les bouts des forêts & des grands bois.

AcCULEMENT. s. m. Tèrme de Marine, qui se dit de la concavité & rondeur de quelques membres qui se placent à l’avant, & à l’arrière sur la quille du vaisseau. Varangues acculées, sont celles qui sont rondes en dedans. Ozanan dit qu’on appelle acculement, la proportion avec laquelle chaque gabary s’élève sur la quille plus que le premier gabary.

AcCULER, v. act. Pousser des ennemis dans un lieu étroit & fermé, d’où ils ne puissent échapper ; les réduire à ne pouvoir reculer, en sorte qu’ils soient obligés de combattre, ou de périr. In angustias redigere, complere. On a acculé les ennemis dans ce détroit de Montagnes, où on les fera périr de faim. On le dit aussi des sangliers, des renards, &c. Les chiens ont acculé le loup.

s’Acculer, signifie au contraire, se placer dans un coin, se retirer dans un lieu étroit où on ne puisse être attaqué par derrière, pour se mieux défendre contre plusieurs ennemis de front. Locis postico imperviis uti ad defensionem. Ce brave s’est acculé contre une muraille, pour n’être point enveloppé par les ennemis. Le taureau s’accule, quand il est pressé avec trop de vigueur par des dogues.

Acculer, en tèrmes de manège, se dit lorsque le cheval qui manie sur les voltes, ne va pas assez en avant à chacun de ses mouvemens ; ce qui fait que les épaules n’embrassent pas assez de terrein, & que sa croupe s’approche trop près du centre de la volte.

Acculé, ée, part. & adj. In angustias redactus.

En termes de Blason, on appelle un cheval acculé, quand il est cabré en arrière & sur le cul. In clunes residens. On le dit aussi de deux canons sur leurs affûts, dont les culasses sont opposées l’une à l’autre ; comme ceux que le Grand Maître de l’Artillerie met au bas de ses armoiries, pour marques de sa dignité. Ce mot se tire du Latin culum. On dit un cul-de-sac.

AcCUMULATION. s. f. Entassèment ; amas de plusieurs


choses les unes sur les autres. Accumulatio, coacervatio. Accumulation de richesses. Il n’y a rien de plus ruineux que de laisser faire une accumulation d’arrérages.

On dit au Palais, une accumulation de droits, ou cumulation, quand quelqu’un prétend un héritage, un bénéfice, en vertu de plusieurs droits de différente nature, comme par mort, par résignation, &c.

AcCUMULER, v. act. Entasser, assembler, amasser plusieurs choses ensemble. Accumulare, coacervare, congerere. Les avares ne songent qu’à accumuler trésors sur trésors. On a puni ce scélérat, qui avoit accumulé crimes sur crimes. On dit aussi en Jurisprudence Canonique, accumulant droit sur droit, quand on obtient cession du droit d’une autre partie pourvue du même Bénéfice. On le dit quelquefois absolument. Les avares ne songent qu’à accumuler. Ce vieil avare accumule tous les jours ; on sous-entend du bien, des richesses.

Accumulé, ée. part. Accumulatus, Congestus. Ce mot vient d’accumulatio, accumulare.

ACCURSE. s. m. Accursius. Nom propre de trois savans Italiens. Les deux premiers, père & fils, célèbres Jurisconsultes du xie siècle, & le troisième, savant Critique du xvie siècle.

AcCUSATEUR, Accusatrice, subst. masc. & fém. Celui ou celle qui accuse, ou qui poursuit quelqu’un en justice criminellement. Accusator, accusatrix. Par le Droit civil il n’y avoit point d’accusateur public. Chaque particulier, soit qu’il eût interêt au crime public, ou non, pouvoit accuser, & conclure au châtiment de l’accusé. En France il n’y a que le Procureur Général, ou ses Substituts préposés dans chaque Siége, qui se puissent constituer accusateurs ; c’est à eux seuls à qui appartient la vengeance publique. La partie civile ne peut conclure qu’à la réparation, & aux intérêts, & non pas à la punition du criminel. En quelque lieu que se trouve un Parricide, il rencontre un Accusateur, un Juge, & un Bourreau. Le Mait. Cette femme est une dangereuse accusatrice. Son accusatrice parut fort animée contre lui. Au dernier jour nos péchés se présenteront comme autant de cruels accusateurs. Nicol. C’étoit autrefois une vilaine chose que de passer pour accusateur. Quintilien l’a dit avant moi, & a mis en proverbe, Accusatoriam vitam agere. Et parce qu’il y eut un Brutus qui fit à Rome ce sale métier, & qui fut appellé l’accusateur, Cicéron l’appelle pour cela le déshonneur de la famille des Juniens. Balz.

ACCUSATIF. s. m. Terme de Grammaire. C’est le quatrième cas des noms qui se déclinent. Accusandi casus, accusativus. Il marque & désigne le terme d’une action, ou d’un rapport, le sujet où passe l’action du verbe, ou de la préposition. Un verbe actif régit l’accusatif. Il y a des prépositions qui demandent après elles un accusatif. En François l’accusatif est semblable au nominatif.

ACCUSATION, s. f. Déclaration en Justice pour quelque crime. Accusatio. Intenter une accusation injuste, calomnieuse. Vous ferez bien de prévenir une accusation si redoutable ; ou de la repousser vigoureusement, si elle est déja formée. Ablanc. Susciter une accusation capitale. Il y a vingt chefs d’accusation contre ce criminel. L’accusation des crimes privés n’étoit recevable par le Droit Romain qu’en la bouche de ceux qui y avoient intérêt:pour les crimes publics l’accusation pouvoit être intentée par quiconque la vouloit entreprendre. Autrefois en France si l’accusation étoit grave, il en falloit venir à un combat ; si elle ne l’étoit pas, tout accusé étoit tenu de se purger du moins par serment. Il n’y étoit reçu qu’en faisant jurer avec lui des gens de sa profession, de son sexe, de sa parenté, ou du moins de son voisinage, gens sans reproche, domiciliés, & connus de l’accusateur. Le Juge en fixoit le nombre, il pouvoit les nommer d’office ; on les tiroit quelquefois au sort. C’étoit ordinairement l’accusé qui les présentoit; & rarement en laissoit-on le choix à l’accusateur. La Gendre. Par le Droit Romain on procédoit par voie d’accusation dans les crimes publics, & par simple action dans les délits particuliers. En France il n’y a que le Procureur Général, ou ses Substituts, qui puissent former une accusation, excepté pour le crime de lèze—majesté, & pour le crime de fausse monnoie, où l’accusation est ouverte à toutes sortes de personnes. Dans les autres crimes les particulièrs ne peuvent être que dénonciateurs, & n’ont droit que de demander réparation de l’offense pour les dommages & intérêts.

Il signifie aussi, Confession. Confessio. Il faut faire une sincère accusation de nos péchés au Prétre.

Accusation, se dit aussi des légères fautes dans les complimens ordinaires. L’accusation que vous me faites de n’avoir point songé à vous en votre absence, est mal fondée.

ACCUSER. v. act. Intenter une action criminelle contre quelqu’un, soit en son nom, soit sous le nom de la partie publique, qui est toujours le Procureur-Général, ou son Substitut. Accusare. Il n’appartient qu’au mari d’accuser sa femme d’adultère. On a accusé de concussion un tel Officier. Caton, l’homme le plus inno-


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