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PIERRE QUI ROULE

dont l’élégance laissait peut-être un peu à désirer, mais qui était tout-à-fait compréhensible pour moi, des choses qu’ils auraient voulu me cacher. Comme ces propos n’avaient rien d’humiliant pour moi, je me gardai bien de leur enlever leur illusion ; mais je me hâtai de reconnaître mon incompétence à me relire rapidement, séance tenante.

« En y mettant le temps, je parvenais cependant à déchiffrer mes barres, demi-cercles et quarts de cercle. L’année suivante, lorsque je faisais du reportage à la Minerve, il m’est arrivé de me servir de la sténographie. C’est moi qui ai sténographié le discours prononcé en 1878 par M. Chapleau, lors du banquet qui lui avait été donné à Saint-Henri.

« Je ne tardai pas à renoncer à ce genre d’écriture, parce que la transcription de mes notes me donnait un travail énorme et parce que mes rapports étaient toujours trop longs pour l’espace disponible. Je pris en conséquence l’habitude de résumer séance tenante, et c’est de cette manière que je rapportai, pour la Minerve, l’assemblée politique de Longueuil et le fameux procès de la Trappe de Sainte-Anne.

« Pendant mon séjour à Joliette, je m’étais remis à cultiver les Muses. Les quelques pièces de vers que j’ai publiées à cette époque avaient été préalablement soumises à M. Joseph Martel, avocat, un fin connaisseur et un versificateur très spirituel et très consciencieux. Quelques-unes de ces pièces ont paru dans mes Chansons Satiriques. Comme bien d’autres, elles n’avaient que le mérite de l’actualité. Deux d’entre elles, dirigées contre les libéraux, me paraissent aujourd’hui dénoter un degré d’esprit de parti dont je me serais cru incapable.

« Je constate que j’avais encore des illusions, surtout en ce qui concerne l’harmonie du rythme et la netteté d’expression indispensable à la poésie sérieuse.