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autrefois divisé la chaudière, ou établi plusieurs fosses régionales, et que personne n’en avait souffert (Rel., x, 260-262). Voyons d’abord un incident antérieur à ce Conseil. La Fête était alors à l’état de projet. Aénons vint voir Echon, au nom de tous les Anciens, durant l’hiver 1635-36, avant la division (Rel., x, 304)



Il nous proposa donc, ſi nous ſerions contens de leuer les corps des deux François qui ſont morts en ce Païs, ſçauoir eſt de Guillaume Chaudron & Éſtienne Bruſlé, qui fuſt tué il y a quatre ans, & que leurs os fuſſent mis dans la foſſe commune de leurs morts.


Brulé était donc enterré.

Le missionnaire refusa la proposition du chef. Les deux Français étaient baptisés, probablement rendus au Ciel, et leurs os étaient trop dignes de respect pour être mêlés aux dépouilles des payens (id., 306) :



Nous adioutaſmes neantmoins apres tout cela, que comme ils eſtoient enterrés dans les bois, & puisqu’ils le deſiroient ſi fort, nous ſerions contens de leuer leurs corps à condition qu’ils nous accordaſſent de les mettre en vne foſſe particulière auec les os de tous ceux que nous auions baptiſez dans le Païs… Nous prétendions les enterrer auec toutes les cérémonies de l’Égliſe. 4. Les Anciens de leur propre mouuement, deſiroient que nous y fiſſions dreſſer vne belle & magnifique Croix comme ils nous témoignèrent par après plus particulièrement. Quelque temps après la chaudière fut diuiſée & comme i’ay dit, cinq Villages de cette Pointe (308) ou nous ſommes, ſe reſolurent de faire leur feſte à part…


Les notables de l’Ours se rassemblaient au printemps pour mettre fin au schisme. Echon était présent. La proposition d’Aénons fut renouvelée, mais comme la scission persistait, on pria le missionnaire de dire de quel côté il désirait faire enterrer Chaudron et Brulé. De Brébeuf laissa la décision aux soins du Conseil. Le maître de la fête de La Rochelle aurait volontiers cédé les deux Français au chef de la Pointe, Aénons. Ce dernier ne prétendait rien faire valoir quant à Chaudron, inhumé à Ossassané, mais il insistait sur le corps de Brulé. Quelqu’un remarqua charitablement qu’il avait bien droit en effet à cette dépouille, puisque sa bourgade avait assassiné le truchement. La querelle s’échauffa, et les deux corps furent abandonnés de part et d’autre (Rel., x, 310) :



(Aénons) ſe deporta entierement du corps de Bruſlé, pour ne point aigrir & enſanglanter dauantage cette playe, de laquelle ceux de cette pointe n’ont peu encore ſe purger.

Ce qui nous fit auſſi reſoudre à faire trouuer bon à ceux de la Rochelle, que nous ne touchaſſions ny à l’vn ny à l’autre…


Les restes de Brulé demeurèrent donc dans les bois. Les Relations ne disent nulle part qu’on ait levé cette sépulture. La pro-