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ils la cherchaient parmi les milliers de gouttes de lumière qui brillaient dans le ciel.

Il y avait un an que l’Homme était passé dans le pays et avait annoncé la venue de l’Étoile. « Lorsqu’elle sera là, disait-il, vous marcherez vers elle et lorsqu’elle s’arrêtera dans sa courbe, vous serez en Terre promise. » L’inconnu connaissait toutes les langues : il avait parcouru tout le continent et harangué les travailleurs des quatre coins de l’Europe. On ignorait son nom, on s’était moqué de lui, de ses images bibliques, on lui avait jeté des pierres. Les gendarmes l’avaient mis en prison. Lorsqu’il comparut devant les juges, il parla longuement et il leur laissa l’âme troublée pour le reste de leurs jours, car il leur révéla la faiblesse humaine. On finit par l’écouter. Ses gestes étaient à la fois si altiers et si miséricordieux, ses yeux étaient si lumineux, son visage si pur dans sa barbe blonde, son verbe si sonore et si caressant, qu’on le respecta. Un vieux fonds de religion traversa les foules. Elles se pressaient pour le voir, le toucher, et les femmes lui présentaient leurs petits enfants.

On disait : « C’est Christ ! », ou bien : « C’est Jaurès ! », ou bien : « C’est Liebknecht ! » Les pires ennemis de l’Homme furent les prêtres, parce que l’Homme prêchait sur les places publiques. Et ils l’excommunièrent.

L’Étoile avait surgi, un soir de premier Mai, à droite de la Polaire. Elle avait des scintillements bleuâtres, comme un métal au sortir d’un four. Elle n’était pas très vieille.

Et l’on vit un spectacle grandiose. Les mineurs remontèrent de leur fosse, les yeux éblouis par la clarté, la bouche rouge dans la face noire, la petite lampe vacillante — leur âme souterraine — au col de la chemise, le pic sur l’épaule, et ils se mirent en route. Les métallurgistes éteignirent les